RoboCop a beau être l’un des personnages de fiction les plus iconiques du 7e Art aux côtés du Terminator, du Xenomorph et du Predator, il n’a jamais véritablement eu les honneurs d’une adaptation vidéoludique digne de ce nom. En 2023, un studio a décidé de relever le défi, ce qui n’a pas manqué de faire réagir les fans de la saga. Pour cause, Teyon est responsable du désastre Rambo : The Video Game. Toutefois, les polonais semblent avoir appris de leurs erreurs. Loin d’être la purge annoncée, RoboCop : Rogue City pourrait bien être l’une des surprises de cette fin d'année. Il est temps d’enquêter dans les rues malfamées de la ville de Détroit.
50% homme, 50% machine, 100% policier
Cette adaptation de RoboCop vise avant tout les boomers et autres cinéphiles ayant grandi dans les années 80. Par conséquent, ce FPS édité par Nacon est parsemé de clins d'œil plus ou moins appuyés aux trois premiers films. Que ce soit les lieux traversés, les personnages rencontrés, les armes utilisées, etc. tout est ici un prétexte à faire vibrer la corde sensible, mais surtout nostalgique des fans du policier cybernétique. Les studios Teyon l’ont bien compris et s’adressent à cette communauté dévouée qui depuis 35 ans attendent un jeu vidéo RoboCop à la hauteur des exploits de leur héros.
Rogue City a l'intelligence de s’intégrer parfaitement dans la trilogie originale au point d’en devenir canon. Les événements contés dans ce jeu de tir font directement suite à RoboCop 2 et introduisent avec une certaine “finesse” les principaux enjeux de RoboCop 3. Il y est également question de la nature profonde de son protagoniste. Humain ? Machine ? Les deux ? Ou simplement policier ? Alex Murphy s’interroge alors qu’il fait face à certains souvenirs issus d’un passé révolu. Cet arc narratif, au demeurant intéressant à suivre, ne mène finalement à rien. Les autres choix imposés aux joueurs suivent la même logique pour au final aboutir en fin de parcours à RoboCop 3 et non à une fin déterminée par vos actions. Nacon s’offre tout de même les services de l’acteur américain Peter Weller qui reprend ainsi son rôle trois décennies après avoir retiré l’armure.
Toutes ces bonnes intentions se frottent malheureusement à une dure réalité. Aussi bons et respectueux soit son scénario, un jeu de tir de cette envergure exige un budget confortable, ce qui semble faire défaut à RoboCop : Rogue City. La mise en scène est trop peu inspirée pour rendre justice aux faits d’armes du héros, exception faite des séquences qui reprennent plans pour plans celles des films, notamment le premier réalisé par Paul Verhoeven. Les transitions gameplay - cinématique sont un autre symptôme du manque de moyens alloués au projet. Aussi affûtée soit la plume, un tel récit aurait mérité une vision cinématographique à la hauteur du mythe !
Le fleuron de la dystopie
Ce jeu de tir parvient bien souvent à surprendre par la minutie avec laquelle il dépeint un Détroit dystopique en proie à la pauvreté et la criminalité. Cet ancien fleuron de l’automobile en ruines tombe peu à peu sous l’emprise de l’Omni Cartel des Produits (ou OCP), une corporation dans la droite lignée du mouvement cyberpunk qui cherche à supplanter le gouvernement et contrôler la ville. RoboCop : Rogue City oscille entre le quelconque vu et revu et le beau techniquement maîtrisé avec ses effets visuels et ses décors semi-destructibles. Cependant, Teyon a eu la bonne idée d’ouvrir son FPS via des zones semi-ouvertes qui brisent la linéarité inhérente au genre.
Ce choix de design encourage Alex Murphy à parcourir les rues et ruelles de Détroit afin d’aider les citoyens en détresse, mais la créature finit par se retourner contre son créateur. Lesdites zones s’avèrent peu nombreuses, ce qui crée un sentiment frustrant de redite, et souffrent d’une structure narrative qui force à finir tous les objectifs - souvent répétitifs - avant de passer au chapitre suivant sous peine d’échouer. De plus, les missions secondaires le sont vraiment et ne présentent que peu d’intérêt, sauf pour ceux en quête d’expérience et donc de puissance (voir ci-dessous). RoboCop finit par traverser la cité machinalement, passant d’un objectif à l’autre pour simplement progresser dans l’histoire.
Protéger & Servir
L’intérêt d’un jeu de tir réside avant tout dans ses séquences d’action qui se doivent d’être haletantes, explosives et aptes à se renouveler au fil d’une aventure exigeant 8 à 10 heures pour être terminée. RoboCop : Rogue City souffle encore une fois le chaud et le froid, mais s’en sort avec les honneurs. Vous ferez souvent la même chose, à savoir liquider des hordes de loubards et autres punks, mais toujours avec style. Le FPS de Nacon parvient à retranscrire par le gameplay la puissance démesurée et dévastatrice d’un policier indestructible et inarrêtable (ou presque).
Les affrontements, ô combien nombreux, sont plaisants, parfois jouissifs, et font honneur aux films (surtout les deux premiers) avec cette approche gore propre à la saga. Sans grande surprise, l’intelligence artificielle des ennemis n’est là que pour leur donner vie, et compense par le nombre leur manque de réactivité. Même les combats de boss qui devraient sublimer l’expérience ne tirent que trop rarement leur épingle du jeu, sans pour autant démériter. Fort heureusement, le bestiaire est suffisamment varié pour épicer les combats. Faire respecter la loi dans le sang et la bonne humeur donnera des frissons aux fans, et c’est bien là l’essentiel.
Avant de faire parler la poudre, Alex Murphy enquête et passe au peigne fin les différentes scènes de crime afin d’y dénicher des indices susceptibles de faire progresser l’intrigue. Sur le papier, cette volonté de faire de RoboCop un véritable agent des forces de l’ordre et non un simple “tank” est louable. Cependant, le plaisir des premières investigations laisse rapidement place à ce sentiment tenace de faire encore et toujours la même chose. Rien n’évolue de ce côté-là du début à la fin de l’aventure. La police enquête ici pour pouvoir passer à la prochaine étape du récit, rien de plus.
L’ajout de mécaniques de jeu de rôle est devenu une prérogative en 2023, même pour les FPS “à l’ancienne”, et RoboCop : Rogue City n’échappe pas à la règle. Teyon permet à notre policier cybernétique de gagner en expérience, de débloquer des aptitudes passives et actives, et d’améliorer sensiblement son arme de service via des items à dénicher dans les niveaux. Cet aspect RPG cherche à immerger les joueurs dans cet univers de science-fiction, mais n’a en réalité que peu d’impact sur l’expérience de jeu. RoboCop reste RoboCop envers et contre tous. Le reste n’est qu’illusion !
Conclusion
Points forts
- Une histoire parfaitement intégrée à la trilogie originale
- Le respect du lore
- Le fan service (Peter Weller, les armes, les lieux, les musiques, etc.)
- Les combats intenses et gores
- La ville dystopique de Détroit et ses zones semi-ouvertes
Points faibles
- La mise en scène peu inspirée
- L'IA des ennemis
- La dimension RPG sous-exploitée
- La redondance des objectifs et des investigations
Note de la rédaction
RoboCop : Rogue City est une adaptation respectueuse et efficace de l’illustre saga de science-fiction éponyme… ni plus ni moins. Le jeu de tir développé par Teyon et édité par Nacon applique scrupuleusement la formule du “FPS à l'ancienne”, non sans tenter de sortir des sentiers maintes fois battus avec plus ou moins de réussite. En définitive, RoboCop : Rogue City fera vibrer les fans de la franchise ainsi que tous les joueurs en quête d’action en provenance de 80’s. Mission accomplie (ou presque).
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